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Théorème de Sophie Germain

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En théorie des nombres, Sophie Germain a démontré le théorème suivant, au cours de ses recherches sur le dernier théorème de Fermat.

Soit p un nombre premier[1] pour lequel il existe au moins un nombre « auxiliaire », i.e. un autre nombre premier θ vérifiant les deux conditions suivantes[2] :

  1. deux classes modulo θ consécutives et non nulles ne peuvent être simultanément des puissances p-ièmes ;
  2. p lui-même (modulo θ) n'est pas une puissance p-ième.

Alors, si trois entiers x, y, z vérifient xp + yp = zp, l'un au moins des trois est divisible par p2.

  • A fortiori, l'un au moins des trois est divisible par p (c'est ce qu'on appelle le « premier cas » du dernier théorème de Fermat). C'est le plus souvent[3] sous cette forme amoindrie et parfois pire[4] que le théorème de Sophie Germain est énoncé.
  • Un « auxiliaire » de p est nécessairement de la forme 2Np + 1 pour un certain entier N.
  • Si p est un nombre premier de Sophie Germain, l'existence d'un θ auxiliaire est assurée : il suffit de prendre θ = 2p + 1. Mais le théorème de Sophie Germain s'applique à d'autres situations (par exemple : p = 3, θ = 13). Elle exhiba un tel θ pour tout premier p < 100, et calcula même, pour ces p, tous les entiers N ≤ 10 pour lesquels 2Np + 1 est un auxiliaire.
  • Sophie Germain démontra ce théorème comme corollaire d'un autre de ses théorèmes, moins connu[2] : sous les mêmes hypothèses, l'un au moins des trois entiers x, y, z est divisible par θ. Ce résultat était bien plus crucial dans son approche du dernier théorème de Fermat : elle espérait en effet parvenir à montrer que pour une infinité de nombres premiers p, peut-être même tous sauf un nombre fini, le nombre d'auxiliaires θ est infini. Elle avait démontré que 3 n'a que deux auxiliaires : 7 et 13. Mais son « grand plan » était voué à l'échec : en 1829, Libri démontra que 3 et 4 n'ont qu'un nombre fini d'auxiliaires et affirma la même chose pour tout nombre premier plus grand, ce que Dickson confirma en 1909[5].
  • L'hypothèse 1 équivaut à[6],[7] l'hypothèse 1' suivante : si xp + ypzp mod θ alors l'un au moins des trois entiers x, y, z est divisible par θ.

Démonstration

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Supposons que xp + yp = zp. Notons a = x/d, b = y/d et c = –z/dd est le PGCD de x, y et z. Alors, ap + bp + cp = 0 et a, b, c sont premiers entre eux deux à deux. Les entiers

vérifient les identités remarquables :

  • p est le seul facteur premier possible commun à b + c et A (et de même pour c + a et B et pour a + b et C) :Si un nombre premier q divise b + c et A alors, mod q, b ≢ 0 (puisque b et c sont premiers entre eux) tandis que 0 ≡ A ≡ pbp–1, donc q = p.
  • a, b ou c est divisible par p :On raisonne par l'absurde en supposant qu'aucun ne l'est. D'après ce qui précède, il existe alors des entiers α, α', β, β', γ et γ' tels que

D'après l'hypothèse 1' (équivalente à 1), on peut supposer par exemple que c est divisible par θ. Alors, θ ne divise ni α ni β (diviseurs respectifs de a et b donc premiers avec c) mais il divise 2c = αp + βp – γp donc, à nouveau d'après l'hypothèse 1', il divise γ. Donc mod θ, a + b = γp ≡ 0 et γ' p = C ≡ pap–1pβp(p–1) si bien que p est une puissance p-ième, ce qui contredit l'hypothèse 2.

  • a, b ou c est même divisible par p2 :Supposons par exemple que c'est c qui est divisible par p. L'entier w := a + b est alors divisible par p (car congru à –cp mod p d'après le petit théorème de Fermat) donc dans
    tous les termes de la somme sont divisibles par p2 sauf le dernier, qui n'est divisible que par p. Comme (a + b)C est une puissance p-ième, on en déduit que a + b est divisible par pp–1. On n'a plus γ, γ' vérifiant les équations ci-dessus, mais on a encore α, α', β, β'. Comme p2 divise a + b = αp + βp – 2c, il suffit, pour prouver qu'il divise bien c, de vérifier que αp + βp est divisible par p2. Comme on sait déjà qu'il est divisible par p, c'est-à-dire (à nouveau d'après le petit théorème de Fermat) que l'entier v := α + β l'est, dans
    tous les termes de la somme sont divisibles par p2, ce qui conclut.

Notes et références

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  1. Les sources précisent généralement p impair (probablement parce que le « grand plan » de Sophie Germain est de démontrer le dernier théorème de Fermat), mais le théorème est également vrai pour p = 2, et Sophie Germain l'énonce sans restriction.
  2. a et b (en) Reinhard Laubenbacher et David Pengelley, « “Voici ce que j’ai trouvé:” Sophie Germain's grand plan to prove Fermat's Last Theorem », Historia Mathematica, vol. 37, no 4,‎ , p. 641-692 (DOI 10.1016/j.hm.2009.12.002, arXiv 0801.1809).
  3. Même dans (en) Harold M. Edwards, Fermat's Last Theorem : A Genetic Introduction to Algebraic Number Theory, Springer, coll. « GTM » (no 50), , 3e éd., 407 p. (ISBN 978-0-387-95002-0, lire en ligne), p. 64 ou (en) Paulo Ribenboim, Fermat's Last Theorem for Amateurs, Springer, (lire en ligne), p. 110.
  4. Voir les commentaires et références de Laubenbacher et Pengelley 2010, p. 12 du lien arxiv et p. 647 de l'article publié et (en) John J. Watkins, Number Theory: A Historical Approach, PUP, (lire en ligne), p. 313-316.
  5. (en) L. E. Dickson, « On the congruence xn + yn + zn ≡ 0 (mod p) », J. reine angew. Math., vol. 135,‎ , p. 134-141 (lire en ligne).
  6. Edwards 2000, p. 65, Exercise 2.
  7. (en) Larry Riddle, « Proof », sur Agnes Scott College, .